De tres beau parler tiennent chayeres,
Se dit-on, les Neapolitaines,
Et sont tres bonnes caquetieres
Allemandes et Pruciennes;
Soient Grecques, Egipciennes,
De Hongrie ou d'autre pays,
Espaignolles ou Castellaines,
Il n'est bon bec que de Paris.

Brettes, Suysses, n'y sçavent gueres,
Gasconnes, n'aussi Toulousaines;
De Petit Pont deux harangieres
Les concluront; et les Lorraines,
Engloises et Calaisiennes,
-- Ay je beaucoup de lieux compris? --
Picardes de Valenciennes;
Il n'est bon bec que de Paris.

ENVOI

Prince, aux dames Parisiennes
De beau parler donne le pris;
Quoy qu'on die d'Italiennes,
Il n'est bon bec que de Paris.

[See Notes]


35   Grant Testament,   lxxiv-lxxix OU nom de Dieu, comme j'ay dit,
Et de sa glorieuse Mere,
Sans pechié soit parfait ce dit
Par moy, plus mesgre que chimere.
Si je n'ai eu fievre eufumere,
Ce m'a fait divine clemence;
Mais d'autre dueil et perte amere
Je me tais, et ainsi commence:

Premier, je donne ma povre ame
A la benoiste Trinité,
Et la commande à Nostre Dame,
Chambre de la divinité;
Priant toute la charité
Des dignes neuf Ordres des cieulx,
Que par eulx soit ce don porté
Devant le Trosne precieux.

Item, mon corps je donne et laisse
A nostre grant mere la terre;
Les vers n'y trouveront grant gresse:
Trop luy a fait fain dure guerre.
Or luy soit delivré grant erre:
De terre vint, en terre tourne.
Toute chose, se par trop n'erre,
Voulentiers en son lieu retourne.

Item, et à mon plus que pere
Maistre Guillaume de Villon
Qui esté m'a plus doulx que mere;
Enfant eslevé de maillon,
Degeté m'a de maint boullon,
Et de cestuy pas ne s'esioye,
Si luy requiers à genoullon,
Qu'il n'en laisse toute la joye.

Je luy donne ma librairie,
Et le Rommant du Pet au Deablt,
Lequel Maistre Guy Tabarie
Grossa qui est homs veritable.
Par cayers est soubz une table.
Combien qu'il soit rudement fait,
La matiere est si tres notable,
Qu'elle amende tout le mesfait.

Item, donne à ma povre mere
Pour saluer nostre Maistresse,
Qui pour moy ot douleur amere,
Dieu le scet, et mainte tristesse;
Autre chastel n'ay, ne fortresse,
Où me retraye corps et ame,
Quand sur moy court malle destresse,
Ne ma mere, la povre femme.

[See Notes]


36   Ballade
Que Villon feit à la requeste de sa mere pour prier Nostre-Dame. DAME des cieulx, regente terrienne,
Emperiere des infernaux paluz,
Recevez moy, vostre humble chrestienne,
Que comprinse soye entre vos esleuz,
Ce non obstant qu'oncques rien ne valuz.
Les biens de vous, ma dame et ma maistresse,
Sont trop plus grans que ne suis pecheresse,
Sans lesquelz biens ame ne peut merir
N'avoir les cieulx, je n'en suis jungleresse.
En ceste foi je vueil vivre et mourir.

A vostre Filz dictes que je suis sienne;
De luy soyent mes pechiez aboluz:
Pardonne moy comme a l'Egipcienne,
Ou comme il feist au clerc Théophilus,
Lequel par vous fut quitte et absoluz,
Combien qu'il eust au deable fait promesse.
Preservez moy, que ne face jamais ce,
Vierge portant, sans rompure encourir
Le sacrement qu'on celebre à la messe.
En ceste foy je vueil vivre et mourir.

Femme je suis povrette et ancienne,
Qui riens ne sçay; oncques lettre ne leuz;
Au moustier voy dont suis paroissienne
Paradis paint, où sont harpes et luz,
Et ung enfer où dampnez sont boulluz:
L'ung me fait paour, l'autre joye et liesse,
La joye avoir me fay, haulte Deesse,
A qui pecheurs doivent tous recourir,
Comblez de foy, sans fainte ne paresse.
En ceste foy je vueil vivre et mourir.


  By PanEris using Melati.

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