Le ciel était charmant, la mer était unie;
Pour moi tout était noir et sanglant désormais,
Hélas! et j'avais, comme
en un suaire épais,
Le coeur enseveli dans cette allégorie.
Dans ton île, ô Vénus, je n'ai trouvé debout
Qu'un gibet symbolique où pendait mon image...
-- Ah! Seigneur!
donnez-moi la force et le courage
De contempler mon coeur et mon corps sans dégoût!
306 L'Horloge HORLOGE! dieu sinistre, effrayant, impassible,
Dont le doigt nous menace et nous dit: `Souviens-
toi!'
Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d'effroi
Se planteront bientôt comme dans une cible; Le Plaisir vaporeux fuira vers l'horizon
Ainsi qu'une sylphide au fond de la coulisse;
Chaque instant te
dévore un morceau du délice
A chaque homme accordé pour toute sa saison.
Trois mille six cents fois par heure, la Seconde
Chuchote: Souviens-toi! -- Rapide avec sa voix
D'insecte,
Maintenant dit: Je suis Autrefois,
Et j'ai pompé ta vie avec ma trompe immonde!
Remember! Souviens-toi! prodigue! Esto memor!
(Mon gosier de métal parle toutes les langues.)
Les
minutes, mortel folâtre, sont des gangues
Qu'il ne faut pas lâcher sans en extraire l'or!
Souviens-toi que le Temps est un joueur avide
Qui gagne sans tricher, à tout coup! c'est la loi.
Le jour
décroît; la nuit augmente; souviens-toi!
Le gouffre a toujours soif; la clepsydre se vide.
Tantôt sonnera l'heure où le divin Hasard,
Où l'auguste Vertu, ton épouse encor vierge,
Où le Repentir même
(oh! la dernière auberge!),
Où tout te dira: `Meurs, vieux lâche! il est trop tard!'